RECIT DE VOYAGE

Mystique Côte d'Ivoire

Intrigantes, déroutantes, mais toutes captivantes sont les danses et sorties des masques en Côte d’Ivoire.
Chaque ethnie a ses propres rituels. Pour avoir le privilège d’être danseur ou musicien il faut avoir été désigné par le groupe lors de l’initiation que chaque membre de la communauté doit suivre dès l’enfance. L’initiation dure sept ans ; pour les hommes il y aura trois cycles de 7ans à différents moments de la vie. Les femmes suivent que le premier cycle. Durant l’initiation les hommes apprennent à soigner avec les plantes médicinales, à diriger un village, à combattre par la magie les ennemies et à se protéger des esprits ainsi que d’autres secrets sociaux et religieux.
Les masques sortent sur demande lors de réjouissance dans le village par exemple pour accueillir une personne importante en visite, mais aussi pour demander une faveur aux dieux ou bien pour les remercier. Lorsqu’il s’agit d’honorer les ancêtres alors seuls les initiés pourront assister à la danse ; si la chorographie reste inchangée, les danseurs mettront plus de force dans leurs pas car la motivation de cette sortie est plus profonde, mystique. L’argent récolté durant le rituel ira en partie au village pour subvenir à ses besoins.
Si les danses Goli, Boloye et Zaouli sont les plus connues, il en existe beaucoup d’autres dont la danse N’Goro qui célèbrent les jeunes filles qui reviennent de la forêt après leur rite de passage. Tout d’abord un féticheur torse nu portant un pantalon de cuir épais apparait en faisant claquer bruyamment son fouet, son rôle est de chasser les mauvais esprits. Il est suivi par des jeunes hommes, également torse nu dansant en cercle, à pas rapides, autour d’un feu de forêt tandis que tambours et balafons impriment le rythme. Les jeunes « vierges » nues jusqu’à la taille se joignent à eux formant une gracieuse ronde. Vers la fin du rite, le féticheur toujours en faisant claquer son fouet se met à danser dans le feu et s’assoie dans les braises vives plusieurs fois.
Une autre danse traditionnelle du Nord de la Cote d’Ivoire met en scène un danseur sur échasses. Il détient deux pouvoirs. Un pouvoir spirituel, surnaturel qui lui permet d’être l’intermédiaire entre les hommes et dieu. Un pouvoir temporel qui lui confère agilité, adresse, lui permettant d’exécuter des acrobaties incroyables avant de disparaitre rapidement alors que continue les chants des femmes. Son pouvoir mystique fait de l’échassier un être respecté, voire craint car il est aussi le juge suprême du tribunal traditionnel.
Les porteurs de masque de la danse « Glé » sont censés pouvoir communiquer avec les esprits, peut-être sont-ils même possédés ? Il existe une grande variété de masque « Glé » appelés à se produire selon les besoins de la communauté. Certains divertissent, d’autres effraient, d’autres sont des médiateurs. Chaque « Glé » a sa personnalité, ses danses et modes d’expression. Les femmes n’ont pas le droit de toucher son lourd costume fait de raphia, plumes et fourrure. Le « Glé » étant considéré comme imprévisible il est toujours accompagné d’une personne chargée de le contrôler.
Dans le groupe ethnique Akan, prédominant dans l’est du pays, des femmes mais aussi quelques hommes sont formés en tant que prêtresses ou komians, sortes de guérisseuses traditionnelles. Les komians maitrisent les plantes médicinales, ont le pouvoir de créer des sorts et prédire l’avenir. Les komians sont invités à accomplir une cérémonie à diverses fins, de l’intronisation des chefs de tribus, au règlement des conflits familiaux et résolution des problèmes de santé. Durant le rituel les komians dansent au rythme endiablé des tam-tams jusqu’à atteindre un état de transe. Auparavant pour se purifier, les komians recouvrent leurs corps de kaolin.
Créé vers 1950 plusieurs légendes existent sur l’origine du masque Zaouli, dont le point commun est qu’il a été inspiré par une jeune fille d’une beauté extraordinaire, aussi le masque Zaouli se distingue par la finesse de ses traits, sa jovialité et sa couleur. Le masque est porté exclusivement par des hommes. Spectaculaire est la vitesse des pas exécutés durant la danse Zaouli pouvant atteindre jusqu’à 200 pas/minute !
Et puis il y a la danse qui fait « tomber la pluie ». Le Boloye ou danse de la panthère était à l’origine une danse des enfants. Puis les adultes vont la perfectionner et lui donner son caractère sacré. Ne porte pas qui veut la tenue de danse, au pelage de panthère d’où le nom de danse de la panthère ! il faut être initié ! Cette danse est faite d’acrobaties ou de deux à cinq jeunes danseurs se défient.
Si le Boloye est une danse de réjouissance, elle possède aussi des pouvoirs mystiques comme celui de faire tomber la pluie, les agriculteurs ont souvent recours à cette danse pour protéger leurs cultures.
Même si nous avons assisté à de nombreuses danses et rituels, la signification de beaucoup d’entre eux nous échappe car ce sont des cérémonies très riches de sens, empreintes de mystère et d’une aura spirituelle dont nous n’avons et n’aurons jamais toutes les clefs. La Côte d’Ivoire a encore bien des secrets à faire découvrir, un quart de sa population pratiquant des religions animistes.

Guide Ismaël: (karamokoleguide@gmail.com)