FALLES D ISIL

Falles d’Isil

Oubliée au cœur des Pyrénées espagnoles, une tradition remontant aux premières brumes du monde se perpétue tous les 23 juin en l’honneur de la saint Jean.
Pas de touristes venus de loin, mais de fervents catalans, andorrans qui ne veulent pas que ce rite se perde. C’est tatoué dans leur cœur, inscrit sur leur peau ! Même si environ 60 villages des deux côtés des Pyrénées sont fiers que leurs fêtes de la saint Jean soient inscrites au patrimoine de l’humanité les falles d’Isil sont et restent les plus spectaculaires.

Tout commence début mai lorsque les falleros vont dans la montagne couper les pins qui seront débités en troncs de 1mètre et demi pesant de 20 à 55 kilos. Mais qui sont ces falleros qui font l’admiration des familles et gens de la vallée ? Ce sont des hommes et maintenant aussi des femmes à qui on confie l’honneur de descendre de la montagne portant leurs troncs incandescents sur leurs épaules pour perpétuer ce rituel. 60 personnes et pas une de plus peut constituer le groupe de falleros d’Isil.
On commence tout petit, la tradition se transmet de père en fils et fille nous raconte David qui se prépare avec sa falle (tronc) de 30 kilos sur l’épaule à partir en cortège là-haut au point le plus élevé de la montagne d’où, avec ses compagnons il attendra le signal du départ.
Il faut avoir 18 ans pour être admis dans le groupe des falleros adultes, les enfants et adolescents ont des itinéraires plus courts mais tous entreront ensemble dans le village, leurs troncs brûlant sur l’épaule applaudis par une foule galvanisée ; leur bravoure rejaillissant sur tous. Ce culte du feu fait la fierté de ce minuscule village de 40 âmes.
Mais pourquoi ce rite du feu si particulier à Isil ? il se dit que cela aurait commencé pour ramener la dernière lumière du soleil du jour le plus long de l’année, ou bien que cela serait un rite de passage vers l’âge adulte, on ne sait pas, on ne sait plus, la mémoire collective a oubliée, comme brûlée avec les braises des falles.

La minuscule place du village ornée d’un immense tronc (la falla major) est fébrile. On s’interpelle, on se chahute car tous se connaissent, tous sont originaire de la vallée, c’est comme une grande famille qui se prépare à partager un moment unique, précieux. Un trajet de 30 minutes en jeep emmènera le groupe des adultes à l’endroit où sèchent les troncs depuis mai. Chargés sur leurs épaules, le groupe devra défier pendant une heure une sente escarpée et inquiétante pour arriver sur le lieu du départ.

22h la falla major de la place est allumée, c’est le signal tant attendu ! les falleros allument en haut de la montagne un feu pour répondre au village, puis à la seule lueur des troncs embrasés un serpentin de feu s’élance sur un sentier improbable dont seul le meneur connaît le chemin… deux heures d’une exténuantes descente où les pieds s’emmêlent avec des racines invisibles, où les genoux s’écorchent frôlant les arbres, où le poids des falles rend toujours plus herculéen l’effort de rejoindre le village. Là, la coutume veut que des jeunes filles offrent à boire et parfois des fleurs aux hommes avant de les laisser continuer leur marche éprouvante. Actuellement bien que le nombre de jeunes filles soit toujours plus important, cette année il y avait autant de femmes que d’hommes, aucun groupe d’homme n’accueille ces gentes dames qui, elles aussi, ont peiné dans la descente pour faire vivre encore une fois le culte du feu!

Les falleros vont devoir faire le tour du village afin de saluer les absents une dernière fois, avant de jeter leurs troncs calcinés au pied de la falla major qui continuera ainsi à brûler jusqu’au petit matin entourée des falleros ,qui ne sentant plus leur fatigue, entraineront la foule dans des danses endiablées.