RECIT DE VOYAGE

SICILE: L’ ÎLE DU SOLEIL

Une terre d’exception! Voila la définition de cette terre. Une île chauffée par le soleil, animée par son volcan l’Etna, partagée entre plages de sable et falaises, entre monts et vallées. Une île autour de laquelle surgissent, comme un écrin, d’autres petites îles aux tonalités et parfums exaltants.
C’est une île aux milles formes et aux mille teintes si bien qu’il est impossible de définir la Sicile en un mot, une image. Tout se mélange, tout se complète et s’annule : c’est une terre de contraste ou se joue une véritable symphonie de couleurs et de fragrances. Avec son climat si doux la Sicile a une végétation typiquement méditerranéenne, du moins près des côtes et dans la plaine. Au fil des saisons elle se pare de quantité nuances, du jaune des genêts et des mimosa au rouge des coquelicots et des bougainvillées, en passant par le vert des prairies et l’ocre de la terre brûlée par le soleil. Tous les sens s'enfièvrent et s’égarent devant sa beauté et en respirant ses arômes car elle fleure bon notre Sicile au printemps ou l’air embaume la fleur d’oranger et le genêt.

Terre de lumière, terre aux mille facettes, terre attachante, terre surprenante ou se côtoient les âmes humbles de ses habitants avec les âmes noires de la Mafia. Mais que serait la Sicile sans la Mafia ? Serait elle aussi connue de par le monde ? Sûrement car la Sicile n’a pas d’âge. Elle prend ses racines dans plusieurs peuplades. Elle a subi mille invasions . Aphrodite, Démeter, Hephaïstos, Eole, Perséphone et tant d’autres dieux ont vécu sur l’île bien avant que ne la découvrent les grecs, les albanais, les byzantins, les normands, les arabes, les espagnols et maintenant les touristes du monde entier. Ses incessantes invasions l’ont façonnée , modelée, pétrie et l’on perçoit dans les traits des Siciliens tous ses ancêtres. Il y a des blonds aux yeux bleus comme les Normands, des typés comme les Arabes, des petits comme les Espagnols, chaque visage porte estampillé l’histoire tourmentée de la Sicile. C’est une terre de mélange qui se retrouve aussi dans son architecture, son mode de vie, dans ses fêtes et coutumes et les noms de ses villages. Elle se fait antique ou baroque, noble ou paysanne et chaque jour a sa fête quelque part. Mais c’est principalement dans la langue que se manifeste sa résistance à l’envahisseur Normand du Moyen-Age, le Sicilien adoptera certains toponymes d’origine arabe qui se transmettront par la suite à la langue italienne.
Terre de richesse, chaque ville a sa spécialité que l’on ne retrouve pas ailleurs comme si elle voulait garder jalousement ses recettes. Il nous faut donc goûter à tout et surtout aux mets les plus rustiques pour mordre dans son âme profonde pour essayer d’en saisir chaque saveur. Mais c’est toujours en vain car la Sicile est déroutante de variété et comme son illustre Mafia elle aime se cacher là ou on ne l’attend point.
Alors il faut aller partout sans se presser, de la mer à l’Etna, son point culminant, en passant par le haut plateau du centre pour croquer sa splendeur changeante selon son humeur, selon le soleil, la pluie ou les grondements de ses volcans. On devient Ben Hur dans ses ruines comme à Ségeste ou Sélinonte, Eschyle dans ses théâtres grecs, Normands à Palerme, noble dame à Syracuse, mondaine à Taormine, aventurière sur l’Etna, dominatrice à Enna , le chef lieu le plus élevé de toute l’Italie.
Mais l’île peut être tout aussi fière de ses savants qui portent haut son honneur car tragédien comme Eschyle, philosophe comme Empédocle, savant comme Archimède, musicien comme Bellini, peintre comme Antonello da Messina la font connaître au delà de ses flots bleus qui l’entourent.
Il ne se passe pas un jour sans que quelque part on ne puisse assister à un rite païen, une célébration religieuse ou une foire villageoise. Les fêtes sont les temps forts de la société sicilienne car elle parle toujours à l’imaginaire. On aime se faire beau, parader, fanfaronner, frimer, rien n’est trop fastueux, riche, voir pompeux pour le Sicilien ; il faut se faire remarquer lors de ces évènements ou durant la promenade du soir où vont se nouer ou dénouer les alliances. Le Sicilien est attachant, déconcertant, mu par un sens de l’honneur et gouverné par la passion. A la fois chaleureux et discret, généreux et disponible, un brin farouche, il se montre d’une indolence matinée de fatalisme ce qui l’empêche de se rebeller contre ses politiques mafieux et les coups du sort.

Aussi la Sicile tel un écho à son histoire, à ses courants d’influences, à la diversité de son terroir, à la richesse de son architecture, à la particularité du caractère de ses habitants, a tout pour séduire et mérite bien plus qu’une halte…